Journée de l'arrivée de l'Evangile
Le 05 mars à Tahiti est un jour férié. On fête ce jour là l'arrivée de l'Evangile avec les premiers missionnaires protestants à Tahiti, le 05 mars 1797.
Seules les communautés protestantes organisent réellement des célébrations. Nous avons eu la joie de participer à 2 d'entres elles ce samedi !
A 8h, Elisabeth, JF et moi nous sommes rendus au temple protestant Paofai sur le front de mer. On ne dirait pas un temple protestant tel qu'on les trouve en France. Il faut dire que la religion protestante de Polynésie s'est affranchie largement de la tutelle anglaise puis française en adoptant un culte autonome. Le protestantisme est la première religion de Tahiti alors qu'aux Marquises ce sont les catholiques qui sont les plus nombreux. Tout est fonction de ceux qui ont débarqué en premiers...
Les dimanches et jours de fête, les femmes sont en blanc et chapeautées tandis que les hommes portent costume et chemise blanche. On est loin de l'image traditionnelle et un peu austère que l'on se fait des protestants !
C'est un régal pour les yeux !
Si j'avais pu, je les aurais chacune prise en photo !
La célébration était surprenante et nous n'avons rien compris car toute en tahitien. Dans le choeur, des hommes étaient assis et venaient à tour de rôle au micro pour des sortes d'homélie ? Ces temps de parole étaient intercalés avec des mélopées durant de très longues minutes. C'est ce qu'on appelle en tahitien les hymene (iméné). La chorale était peu importante mais les voix d'hommes et de femmes se répondaient avec une grande intensité. La célébration a duré 1h30 mais nous sommes partis au bout d'une heure pour revenir au moment où tout le monde sortait du temple. Un des paroissiens arborait une grosse cravate portant l'étoile juive et le chandelier à 7 branches ! Comme nous le félicitions pour sa belle cravate, il nous a répondu fièrement qu'il s'était rendu en Israël pour l'acquérir !
Nous nous sommes ensuite rendus à la pointe Vénus où ont débarqué les premiers protestants. Sous un fare, nous avons été attirés par des chants et des danses...Nous sommes restés pour regarder et l'on s'est rendu compte que nous assistions à une nouvelle célébration de Protestants maohis.
"L'adjectif maohi correspond à tout ce qui est relatif à la Polynésie et à ses habitants, nommés Maohis. "
"L'arrivée de l'évangile à Tahiti s'est faite le 5 mars 1797 dans la baie de Matavai où le Duff a accosté avec les missionnaires protestants anglais de la London Missionnary Society à bord. Dix-huit d’entre eux avaient pour mission de s’installer à Tahiti. Ils avaient à leur tête le pasteur John Jefferson. Ils débarquèrent le 7 mars et furent reçus sur la plage par le jeune roi Pomare II et sa femme Tetua Tetua portés sur les épaules des indigènes. II n’y avait comme hommes considérés comme instruits et réellement lettrés, que les quatre ministres du Saint Évangile. Les missionnaires, quoique sachant lire et écrire, n’étaient affectés qu’à des travaux manuels.
Henry Nott avait seulement 23 ans quand il débarqua dans la baie de Matavai, il y a 219 ans. Maçon de profession, sachant à peine lire et écrire, ses sept mois de voyage depuis l'Angleterre sur le Duff lui permettent, avec la trentaine d'autres missionnaires d'apprendre le tahitien avec les manuels de l'époque -dont le vocabulaire rapporté par les mutins du Bounty. Nott apprend la langue tahitienne plus vite que les autres et il est choisi pour faire le premier sermon en tahitien, à Tahiti, le dimanche 16 août 1801. "
C'est le même Henry Nott qui traduira la bible en Tahitien.
Là encore, que les femmes sont belles !!!
Je découvre à chaque fois de nouvelles façons de tresser les couronnes de pandanus !
C'est de temps de la consécration à la façon maohi. ici, ce sont l'eau de coco et le uru (fruit de l'arbre à pain) qui remplacent le pain et le vin !
Certaines personnalités boivent directement l'eau de coco dans la coco remplaçant le calice.
Puis nous sommes invités à communier. Il faut en premier prendre une petite vérine individuelle contenant l'eau de coco (le sang du Christ) et rangée avec beaucoup d'autres dans des sortes de tiroirs-plateaux. Sur un plateau, des morceaux de uru font office d'hosties consacrées.
A la fin de la célébration, nous sommes invités comme les autres à venir partager le repas ! Sur de grandes tables, des marmites de riz et de poulet aux champignons, des bananes. C'est extraordinaire comme nous sommes bien accueillis ! Nous apercevons le pasteur qui fait signe à une dame à propos de notre présence. Je pense qu'il voulait être sûr que nous ayons été invités à déjeuner. Nous irons le remercier à la fin du repas.
Nous dégustons notre déjeuner improvisé. Nous n'avions aucun projet et notre journée fut une succession de cadeaux !
Avant de profiter un peu de la plage de sable noir, nous emmenons Elisabeth dans les quelques boutiques d'artisanat se trouvant là. Nous retrouvons un visage connu (JF a une mémoire incroyable !). Il s'agit d'un Tahitien qui a participé avec nous à la surveillance du concours de l'Administration pénitentiaire en janvier. C'est sa compagne qui est la responsable du centre artisanal. Tandis que son compagnon repart au travail, Te Vahine ("la femme" en tahitien), partage avec nous sur son travail, sur sa vie, sa famille...
C'est un moment magique où elle nous raconte comment elle a été abandonnée par sa mère, remise à son grand-père qui lui a choisi son prénom. C'est lui qui la construite, comme elle dit. Ce même grand-père (qui vit sur une petite île des Tuamotu et qu'elle n'a plus revu depuis 16 ans...c'est loin et cher...) aimerait la conduire en mariée à l'église...mais son compagnon hésite à se marier et Te Vahine veut qu'il soit sûr avant de s'engager. Elle a peur que son grand-père meurt avant ce jour là et elle a peur aussi que, si elle se marie, il se laisse mourir ensuite. Son compagnon n'a pas envie d'aller se marier aux Tuamotu car ces minuscules atolls au ras de l'eau lui font peur ! Il faut dire que la dernière fois où Te Vahine s'est rendue chez son grand-père, elle a du rester 2 mois là-bas car le bateau assurant la liaison était tombé en panne !
Si j'ai bien compris aussi, Te Vahine est grand-mère...Nous n'avons pas su lui donner d'âge mais elle a du être maman très tôt et le papa n'est pas celui avec qui elle veut se marier. C'est toujours très compliqué les histoires de familles ici !
Te Vahine est pleine de sagesse et ses propos nous laissent pantois. Quelle belle rencontre nous faisons encore là ! Comme si cela ne suffisait pas, Te Vahine m'offre un sac qu'elle tressait en palme de cocotier pour ne pas s'ennuyer, ainsi que des petites balles de sa fabrication !
Et, comme si ça ne suffisait toujours pas, Elisabeth lui achète et m'offre une belle couronne réalisée par Te Vahine en pandanus !
Quelle belle journée improbable nous venons de vivre !!!
Surprise ! Nous voici en photo dans le journal Tahiti infos !